Pendant le confinement, nous vous présentons des merveilles et des pépites du patrimoine cantalien !
A première vue, l’église d’Ydes-Centre perchée sur sa butte, n’a rien ni d’ancien ni de semblable à l’église romane et templière d'Ydes-bourg. Et pour cause, la construction de cet édifice est liée au développement de l’activité houillère dans le nord Cantal.
Au XIXe siècle, l'industrie du charbon fournit du travail à de nombreux mineurs qui s'installent entre autres à l'Hôpital-Ydes (aujourd'hui Ydes-Centre) et où la Compagnie des houillères de Champagnac fait construire la « chapelle des Mines » vers 1880.
Mais le nombre de paroissiens ne cesse d'augmenter et la chapelle est bien trop petite pour accueillir tous les fidèles. L'Hôpital-Ydes, qui dépendait de la paroisse d'Ydes-Bourg, devient en 1919 une paroisse indépendante. Est alors décidé la construction d’une église.
De nombreux appels aux dons sont lancés auprès des mineurs et des locaux par le curé Astic. Les fonds récoltés permettent la réalisation d’une première tranche de travaux (comprenant abside et nef) en 1922 et 1923. La bénédiction de la nouvelle église paroissiale Sainte-Jeanne-d’Arc, par l'évêque de Saint-Flour, a lieu le 15 avril 1923.
La seconde phase de travaux en 1941 et 1942 permet un agrandissement de la nef (deux travées supplémentaires) et l’ajout du clocher. Les cloches y sont installées en 1943.
L’implication et les dons conséquents des mineurs valent à cet édifice le surnom d'église "des Mineurs".
Construite au début de la période "Art déco", l'église Sainte-Jeanne-d'Arc arbore pourtant un style néo-roman sobre et épuré. L'édifice est constitué d'une abside voûtée en cul-de-four et d'une large nef bordée de chapelles latérales. La voûte en berceau est confortée par des arcs doubleaux et les murs gouttereaux (porteurs) sont percés de baies en plein-cintre.
A l’intérieur, le souvenir des mineurs est rappelé aux mémoires par la Croix des Mineurs offerte par ces derniers en 1958. C'est une œuvre des ateliers de la mine composée à partir d'objets et de métaux récupérés. Les lampes ont été électrifiées et sont allumées lors des obsèques d'anciens mineurs (ou de leurs épouses ces dernières années).
Les vitraux : le trésor de l'église
Les deux campagnes de vitraux correspondent aux deux phases de construction de l'édifice.
Adrien Baratte (maître-verrier installé à Clermont-Ferrand) a signé les vitraux du chœur et de la partie ancienne de la nef dans l’esprit de vitraux du XIXe siècle.
Deux d’entre eux attirent particulièrement l'attention : celui dédié à sainte Jeanne d'Arc, patronne de l'église, porte la signature du maître-verrier. La sainte est représentée en pied à l'intérieur d'un décor architecturé, une frise de fleurs de lys forme la bordure du vitrail. Celui de sainte Barbe, patronne des mineurs, porte quant à lui la dédicace à « Edmond Pochat, fondateur et directeur de la Société des Mines de Champagnac 1847-1924 ».
Les autres verrières, dans le restant de la nef et la partie occidentale de l'église, arborent un style de transition entre Art déco et Art contemporain. Ils sont signés « Mauméjean », maîtres-verriers installés en Espagne puis en France, à Paris et Hendaye.
La structure de ces verrières est semblable à celle des vitraux d'Adrien Baratte mais le style est résolument plus moderne. Les couleurs chatoyantes mettent en valeur les personnages dont les silhouettes sont soulignées par des lignes courbes alors que l'architecture et la décoration sont constituées d'entrelacs de formes géométriques.
Sur le vitrail de saint Louis est représenté dans la partie inférieure le chanoine Astic, curé de la paroisse et fondateur de l'église : l’identité du donateur est renseignée par l’inscription « Don de Monsieur le Chanoine Astic Siméon Curé ». Agenouillé, il offre la maquette de l'église à sainte Jeanne d'Arc. Le visage du prêtre est extrêmement réaliste, certainement issu d'une reproduction photographique.
Actu patrimoine : ces vitraux font l’objet d’un inventaire et feront partie de la publication sur les vitraux XXe et XXIe du Cantal à paraître en 2021.
Pascale Chappot, Guide-conférencière
Pour en savoir plus :
- Benoît MANAUTE, « La Manufacture de Vitrail et Mosaïque d'Art Mauméjean. Flambe ! Illumine ! Embrase ! », Bordeaux, Editions Le Festin, 2015
- Pascale CHAPPOT, « Les vitraux et œuvres de l'atelier Mauméjean dans le Cantal », RHA, T. 78, janvier-mars 2016, p. 95-110