Les 2 et 3 juin 2009, le Centre national du livre jeunesse – La joie par les livres, désormais abrité à la BNF, organisait le premier stage consacré au jeu vidéo en bibliothèque. En tant que responsable du prêt des cédéroms et dévédéroms dans les médiathèques du réseau, ce sujet m’intéressait tout particulièrement. Le fonds de la médiathèque départementale est constitué de titres culturels, pratiques, ludoéducatifs mais ne propose pas de jeux vidéo. L’observation des choix des bibliothécaires du réseau lors du renouvellement des dépôts (un goût de plus en plus marqué pour des titres résolument ludiques destinés à un public jeune) et de l’offre éditoriale (marquée par un glissement très net du « ludo-éducatif »vers le jeu proprement dit) a logiquement débouché sur cette question : la médiathèque départementale doit-elle proposer du jeu vidéo ? Le jeu vidéo fait désormais partie du paysage culturel mais sa présence dans les médiathèques suscite interrogations voire réticences. Certains établissements, comme Montpellier, ont franchi le pas. D’autres, comme Grenoble, s’apprêtent à le faire et beaucoup continuent de s’interroger. Ce stage, premier du genre, arrivait donc à point nommé.

Je me propose ici de vous en faire un rapide compte-rendu espérant susciter vos réactions et commentaires.

 

Qui joue au jeu vidéo ?

 

- 37 % des français de plus de 15 ans se déclarent joueurs

- 70 % des 8-19 ans sont équipés d’une console de jeu

- âge moyen du joueur français : 38 ans

- Le joueur est plutôt un garçon : 29 % des ventes pour les filles, 71 % pour les garçons

- Les filles utilisent plutôt les consoles portables (70 % de leurs achats en jeu vidéo)

- les garçons utilisent plutôt les consoles de salon (65 % des achats en jeu vidéo)

 

Comment joue-t-on au jeu vidéo ?

 

- sur un ordinateur en utilisant un jeu pour PC ou directement en ligne via internet

- sur une console de salon munie de manettes de jeu branchée sur un téléviseur. (Playstation, playstation2, playstation3 (chez Sony), Xbox (microsoft), Wii (Nintendo)

- Sur une console portable (Nintendo DS, DSi, DSl), PSP (Sony)

Le marché des consoles est très évolutif, une version plus performante en terme de graphisme et de puissance en remplace une autre rapidement. Par exemple, la playstation arrive en 1995, la playstation 2 en 2000 et la playstation 3 en 2007, nécessitant à chaque fois de nouvelles versions des jeux. Nous en sommes aujourd’hui à la septième génération des jeux vidéo. Les derniers modèles (Playstation3, Xbox360 et Wii) possèdent des disques durs permettant une connection sur internet (espace boutique des constructeurs) afin d’acheter en ligne et de télécharger des compléments de programmes (des « add-on »). Certains jeux sont désormais disponibles uniquement en téléchargement. Le marché semble donc s’orienter vers une dématérialisation des contenus.

 

Avec quels jeux jouer ?

 

- des jeux d’action comprenant des jeux de combat où deux personnes s’affrontent en duel (street fighter, Mortal combat), des « beat them all » où un seul joueur affronte plusieurs ennemis (double dragon, Viewtiful Joe), des jeux de plateformes où le héros doit remplir un objectif en évitant les pièges (super Mario galaxy, Rayman, prince of Persia) Ces jeux sont techniques et demandent de la compétence de la part du joueur.

- des jeux de tir consistant à tuer le plus d’ennemis possible. Plusieurs variantes existent selon que l’on voit (grand theft auto, Max payne) ou non (Doom, Quake) le tireur à l’écran. La catégorie dite « Infiltration » consiste à tuer bien sûr mais intelligemment, le moins possible et sans se montrer (Splinter cell, metal gear solid) Ces jeux se caractérisent donc par un univers violent impliquant mafia et tueurs mais aussi par de beaux décors et un graphisme élaboré.

- des jeux d’aventures comprenant les « point and click » (devinez, pointer, cliquer) (Myst, Syberia) et les « survival horror » dans lesquels il faut rester en vie en affrontant zombies, vampires et autres créatures délicates.. (Resident evil, Alone in the dark)

- des jeux de rôles où on incarne un personnage choisi et qu’on fait évoluer (Final fantasy, Dragon quest, Zelda, Dofus..). Ces jeux peuvent être des jeux d’action, de tactique ou de combat. Ils se caractérisent par leur originalité, la qualité de leur scénario et de leur graphisme.

- Des jeux de réflexion (lemmings revolution, Katamari, Sims, Spore)

- Des jeux de stratégie où l’on crée et gère un monde (Age of empire : mythologie, Conquer)

- Des jeux de sport (Fifa, Virtual tennis, gran turismo, Mario Kart)

- Des jeux de simulation (Wii sports resort, Wii fit)

- Des jeux de rythme (Guitar hero, Wii music)

 

Comment savoir si un jeu est adapté à son public ?

 

Depuis 2003, des logos décrivant les contenus des jeux vidéo figurent sur tous les emballages : c’est la classification PEGI (pan european game information) mise en place par le SELL (Syndicat des Editeurs de Logiciels de Loisirs) au niveau européen afin d’éviter que des mineurs ne soient exposés à des contenus inappropriés.

Le système PEGI classe les contenus selon deux critères :

- l’âge du joueur (5 catégories de 3+ à 18+) Mais attention : un jeu classé 3+ par exemple signifie qu’aucune image n’est susceptible de heurter un enfant de 3 ans mais ne signifie pas qu’un enfant de cet âge est capable de faire fonctionner le jeu en question ! ce sont les images qui sont évaluées et non le niveau de compétence requise chez le joueur.

- le type de contenu (violence, langage employé, risque de faire peur, évocation de la sexualité, de la consommation de drogue, risque d’inciter à la discrimination, jeu de hasard)

 

Emprunter des jeux vidéo à la bibliothèque ?

 

Créer un fonds de jeux vidéo constitue un réel investissement pour un établissement.

Il faut savoir que :

- le jeu vidéo fonctionne essentiellement sur le critère de la nouveauté. (il faut avoir les dernières sorties pour un public exigeant et au fait de l’actualité du jeu)

- Les titres vieillissent vite : les titres de sport (football par exemple) sortent une nouvelle version chaque année. Les jeux d’aventure peuvent durer jusqu’à 3 ans.

Il faut donc désherber et renouveler le fonds régulièrement.

- Dans l’idéal, il faudrait équilibrer le fonds en fonction de l’équipement des foyers et proposer, pour avoir une offre attrayante : 100 titres en DS, 50 titres pour la Wii, la PS2, la PS3 et la X-box, 100 titres pour PC, soit un total de 400

titres.

- Le budget à prévoir est donc conséquent sachant que pour une bibliothèque les prix peuvent aller de 60 à 120 € par titre.

- Pour l’instant l’offre des fournisseurs des bibliothèques n’est pas très étoffée, sauf peut-être pour les jeux sur PC.

 

Ce stage de deux jours, très formateur et fort intéressant, a suscité chez moi remarques et questionnements :

- Le jeu vidéo concerne un public d’adolescents et de jeunes adultes peu représentés en bibliothèque et qui pourrait y (re)venir si l’offre colle à l’actualité (nouveautés), si elle est renouvelée régulièrement et suit les évolutions technologiques.

- le jeu vidéo a un coût élevé si l’on veut proposer un service de qualité.

- Faut-il et peut-on proposer tous les supports (PC, Playstation, PSP, DS, DSi, DSl, Xbox) ?

- Tous les jeux ont-ils leur place dans une bibliothèque (combat, tir….) ?

- La demande existe-t-elle dans les bibliothèques du réseau départemental ? Pour l’instant, elle n’est pas clairement formulée (mais le choix des cédéroms peut faire penser qu’elle existe)

- Quel est l’avenir d’un tel service, sachant que les constructeurs semblent s’orienter vers le téléchargement des jeux et proposent déjà le jeu en ligne ?

Nous en sommes au stade de la réflexion et vos avis et remarques, toujours riches en enseignements, nous sont précieux. Je vous invite à nous les faire connaître. Ce service, s’il vient à naître, sera aussi et surtout le vôtre.

 

Nina Llavori

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